Pascal :
L'aube se lève. C'est une matinée triste et maussade qui m'attend une fois de plus, alors que le château, glacial et humide, a été déserté par ses habitants les plus chanceux. Mon père et mes frères adorés ont en effet prétexté une vague expédition contre des gobelins pour me laisser seul la charge de notre maison. Je remercie Sigmar de cette opportunité, que je ne mérite pas...
La première personne que je rencontre est mon mentor, le chapelain Roderic Brener, fort habile dans l'art de détecter le péché. Son regard inquisiteur, froid comme l'acier, est craint de tous. Bien sûr, il est resté avec moi au château. Malgré tout, je ne me laisse pas intimider. Après tout, j'expie déjà chaque jour la mort de ma mère à ma naissance...
Il m'informe qu'un de ses collègues, Varl Herz, est chargé de la construction de la cathédrale de Sigmar à Grenzstadt, sur le terrain... donné... par mon père. Il a besoin d'aide car il semblerait qu'il y ait de nombreux problèmes sur le chantier. A ces mots, un faible sourire apparaît sur mes lèvres, j'apprécie quand le destin s'acharne sur quelqu'un d'autre.
Rempli d'une énergie nouvelle, je recrute Biankka, deux gardes et l'émissaire elfe (dans l'ordre décroissant d'utilité) et nous partons sans tarder pour la ville.
Lorsque nous arrivons chez Varl Herz, ce dernier est en pleine discussion avec son architecte, Giovanni da Luccini, génie (autoproclamé) venant de Tilée. Ils sont remplis d'enthousiasme par les futures fresques de la cathédrale, inédites. Elles représentent tous les dieux en adoration devant Sigmar en majesté. Au niveau artistique, c'est précurseur. Au niveau théologique, c'est une hérésie...
Nullement désarçonnés par ce début, forcément prometteur, nous sommes avertis que le chantier accumule du retard à cause de profondes tensions raciales. En effet, les ouvriers nains n'ont pas confiance dans le travail de leurs confrères humains, et ceux-ci ne supportent pas l'arrogance de ces "sales nabots barbus". Le maître d'oeuvre désigné par la guilde des architectes, Hanz Reise, est totalement dépassé par les récriminations quotidiennes et incessantes des deux groupes, et sombre peu à peu dans l'alcoolisme. Désespéré, Il accepte volontiers notre aide car il nous serait difficile d'aggraver la situation. Ca se voit qu'il ne nous connait pas...
Une fois sur le chantier, nous nous rendons vite compte que la situation est pire que prévue. Il va nous falloir agir vite avant que les disputes et bagarres ne dégénèrent en bataille rangée entre nains et humains !
Ainsi, alors que nous faisons un premier tour du chantier, nous surprenons deux ouvriers, un nain et un humain, en train de critiquer chacun vertement le travail de l'autre. Ils finissent par en appeler au jugement du maître d'oeuvre, qui se soûle discrètement dans un coin. Devant la multitude de détails invoqués par ces deux énergumènes, je prends conscience qu'ils doivent passer leur temps à inspecter le chantier au lieu d'y travailler. Equitablement, je les prive d'une journée de paye et leur enjoint de se remettre au boulot fissa ! Après ce coup d'éclat, la journée se passe assez bien.
Cependant, le vice étant ancré dans le coeur des hommes, notre répit n'est que de courte durée. Le lendemain, un ouvrier humain se plaint que le coup d'oeil d'un nain sur son échafaudage vaut inspection et donc une privation de salaire. Après une leçon de vocabulaire sur la durée nécessaire d'une inspection, le chantier reprend... pour un instant seulement. En effet, sur le moindre prétexte les ouvriers s'arrêtent pour fixer intensément, mais brièvement, le travail des autres... Enfin si ça les amuse...
Ce n'est qu'un exemple des nombreuses vicissitudes que nous allons rencontrer durant les huit semaines de notre présence sur place. Nous lutterons tous les jours pour faire avancer le chantier d'une cathédrale hérétique, cause certaine de futures guerres de religion, et bâtie de surcroît sur la spoliation de mon héritage...
Nul doute dans nos esprits, nous ne pouvons que réussir...
Des mesures drastiques nous permettent, malgré une ambiance détestable, de poursuivre la construction : séparer dans le temps ou dans l'espace les plus bornés de chaque camp, punir fortement la moindre incartade, récompenser collectivement tous les ouvriers en cas d'objectif rempli... Malgré cela, mon garde du corps, imposé par mon père, est obligé d'intervenir de nombreuses fois pour séparer des ouvriers avant qu'une bagarre ne dégénère. Le pire, c'est qu'une enquête auprès des chefs de chaque communauté et dans les auberges accueillant les ouvriers nous permet d'établir que nulle conspiration ne se cachait derrière nos problèmes. Seuls des préjugés imbéciles sont en cause...
Pfff, on ne trouve jamais de sectateur du chaos quand on en a besoin. Et dire que le pire est encore à venir...
La situation n'est en fait pas meilleure dans la cité que sur le chantier. Nous sommes témoins en plusieurs occasions de la corruption d'une bonne moitié du guet, couverte par au moins un échevin membre du conseil gérant Grenzstadt. La mafia, humaine et non naine malgrè la rumeur, règne déjà en maître sur les quartiers populaires. Seul Igor, le sergent du guet, essaye de maintenir l'ordre avec le peu d'hommes qui lui sont fidèles. Mais il est souvent envoyé sur de fausses pistes, ce qui mine sa crédibilité.
La situation des nains est précaire. Accusés de voler les emplois des humains et de faire de la concurrence déloyale, ils sont relégués dans un ghetto hors des murs et ne sont pas représentés au conseil. Le manque de constructions en dur dans le faubourg est une cause importante des mauvaises conditions de vie des nains, mais aussi des humains qui n'ont pas les moyens de s'installer en ville.
Ainsi, l'inflation galopante des prix de l'immobilier se rajoute à la corruption et aux autres problèmes de la population. C'est dans ce décor charmant que l'apocalypse allait se produire...
Malgré notre grande mansuétude, nous devons virer de nombreux fauteurs de troubles humains au cours des semaines. Désoeuvrés et aigris, ils passent leurs soirées ensemble à dilapider leurs payes dans la boisson, et à ressasser sans cesse la cause évidente de la perte de leur emploi : les nains !
Au cours d'une nuit plus arrosée que les précédentes, ce groupe de séditieux prend violemment à partie des ouvriers nains venus se détendre dans leur auberge après une journée de dur labeur. L'intervention d'un garde du château, chargé de la surveillance des auberges, ne permet pas d'empêcher que la bagarre ne dégénère.
Une lanterne se fracasse sur le sol, ce qui déclenche un incendie. Heureusement, le chantier n'est pas loin. Le garde court nous avertir et nous pouvons vite organiser une chaîne pour éviter que l'incendie ne s'étende à toute la ville. Seule l'auberge et les deux maisons voisines (merci les encorbellements) finissent brûlées.
Le guet, vite averti, n'arrive que bien après la fin de l'incendie. Et encore, il faut le retour d'Igor, envoyé sur une fausse piste par des malandrins, pour qu'une escouade daigne sortir de la Tour du guet pour nous aider. Les humains et les nains s'étant battus sont emprisonnés.
Ce n'est toutefois que le début de nos ennuis, car la politique va s'en mêler...
Le lendemain, la tension est palpable en ville. Les différentes communautés, inquiètes, se retranchent dans leurs quartiers respectifs. Mais ce qui met définitivement le feu aux poudres est la suite judiciaire de l'incendie. Les échevins, méprisant la simple réalité des faits et les nombreux témoins, décident de relâcher immédiatement les hommes, pourtant responsables du déclenchement de la bagarre. Seul un nain reste en prison, accusé d'avoir provoqué, intentionnellement ou non, la destruction de l'auberge par le feu.
Igor, dégoûté et sous la pression constante des corrompus, décide de démissionner et de vendre sa charge de sergent du guet. Nous réussissons à le convaincre de libérer d'abord le nain, de l'escorter jusqu'au faubourg, et de vendre directement sa charge à Georg Hamsfül, mon garde du corps. Cette solution, bien que déjà désespérée, faillit réussir...
Nous sommes en train d'accompagner le nain et son escorte quand nous découvrons qu'un agent du guet, pourtant réputé fidèle à Igor, nous a trahi. Nous nous retrouvons encerclés par une bande nombreuse et armée d'humains bien décidés à lyncher le nain. Plutôt que de l'abandonner, nous essayons de nous enfuir, puis de nous réfugier sous une pluie de pierres dans une maison. Le plus rapide des gardes pique un sprint pour prévenir le quartier nain et nous amener du renfort. Hélas le nain et l'un des agents du guet sont rattrapés et mis en pièces par la populace en furie.
Après avoir barricadé notre refuge, nous parvenons en passant par les toits à nous mettre en sécurité. En bas, les nains, aidés des fidèles de Sigmar, ont contre-attaqué. L'émeute, qui couvait depuis plusieurs semaines, a fini par éclater !
Grenzstadt n'est plus qu'un gigantesque champ de bataille, humains contre nains, fidèles d'Ulric contre fidèles de Sigmar, mafieux contre forces de l'ordre. Il nous faut reprendre l'initiative. N'écoutant que mon courage, je décide de revenir au coeur de la cité, et de monter à un balcon afin d'haranguer la foule pour la calmer. Notre château ayant été vidé de ses troupes grâce à la prévoyance de mon père et de mes frères, nous n'avons guère le choix des moyens.
Je suis prêt à tout pour ramener le calme. Même au mensonge le plus éhonté. Ainsi lorsque la foule accuse ma famille d'être vendue aux nains, je réfute brillamment l'accusation en montrant l'émissaire elfe à mes côtés. Si mon meilleur ami est un elfe, je ne peux décemment pas être favorable aux nains ! L'argument porte, et décontenance la foule. Ce qui est vrai, c'est que je n'ai jamais été aussi heureux d'avoir un elfe près de moi. En effet, un fanatique prend son arquebuse et la pointe sur moi. L'elfe l'ayant aperçu a juste le temps de me pousser à terre. La balle siffle à mes oreilles. L'elfe m'a sauvé ! Finalement c'était vraiment mon meilleur ami !
C'est ce moment que choisit pour intervenir un groupe de répurgateurs, présent dans la ville depuis quelque temps mais jusque là passif. L'un d'entre eux charge sur son destrier mon (presque) meurtrier. Sa monture se déchaîne contre ce fou, qui meurt dans une éruption de sang et de boyaux ! Voilà ce qui arrive à ceux qui manquent de respect à Sigmar !
Cela ramène un calme relatif en ville, même si une reprise de l'émeute reste possible à tout instant. Mais nous n'allions pas tarder à constater qu'un sinistre individu comptait bien utiliser ce drame à son avantage.
e répit est de courte durée. Le lendemain, alors que nous pensons apercevoir enfin le bout du tunnel, nous apprenons qu'un détachement de cavalerie étranger est en train d'envahir la cité ! Il semblerait qu'un noble voisin, alerté (ou cause ?) de nos problèmes, ait envoyé une partie de ses troupes pour occuper Grenzstadt. Nous nous précipitons vers la place centrale de la ville, où nous pouvons entendre le discours de l'officier commandant ce détachement.
Il ne propose rien de moins à la population que de reconnaître comme nouveau maître le Comte Matthias Von Grünwald ! Encore lui ! (voir 2ème scénario). Il argumente que le comte est le seul capable de ramener l'ordre face à l'incompétence des échevins et du baron Konrad ! Je l'interromps immédiatement, et enjoins la population à ne pas soutenir ce vil profiteur étranger, sûrement complice des émeutiers !
Un groupe de cavaliers commence alors à nous encercler. Craignant, sinon pour nos vies, au moins pour notre liberté, nous nous réfugions dans le Temple de Sigmar. C'est là que nous sommes témoins d'un véritable miracle ! Le bon père Gérolf Vogt, à la tête du culte de Sigmar mais grabataire et presque sénile depuis plusieurs mois, trouve la force de se lever pour se rendre au balcon du Temple. Là, soutenu par Varl Herz et moi, et sûrement
empli d'une inspiration divine, Gérolf Vogt exhorte la foule à s'unir et à se soulever contre l'envahisseur ! Auréolé de lumière, il finit son discours puis s'écroule dans les bras de son successeur, Varl Herz, mort !
Faisant taire pour un moment leurs dissensions, les différentes communautés de Grenzstadt suivent les dernières recommandations de leur père spirituel, et attaquent les cavaliers. Les combats auraient pu cependant faire de nombreuses victimes parmi la population, mais elle n'eut heureusement qu'à tenir bon jusqu'au retour triomphal de mon père et de ses troupes... Enfin ! Mieux vaut tard que jamais...
La cité libérée est occupée par les troupes de mon père, le temps de régler ses problèmes sociaux, politiques et religieux. Il nous faut maintenant trouver des solutions pour le long terme... Des volontaires ?...